Nous ne sommes que deux ce matin. Le réveil, nous graciant d’une miséricorde dominicale, rougit de chiffres devant son être à demi dénudé. Les chiens du quartier, las d’abreuver les fêtards de leurs réprimandes, semblent pousser leur narcose tandis que j’ouvre un oeil.
Apaisée, calme et souriante, pas un seul spectre n’est venu profaner son long repos. La main posée sur le sein, comme à son habitude, elle m’avise de ses yeux coquins.
Le clocher entame sa ritournelle, il nous berce de son hymne quotidien. Immuable. Lui qui sait si bien nous agacer lorsque nous aspirons à une plus longue détente. Je la couvre de baisers, à satiété, elle esquisse un sourire. Je n’en aurais jamais assez pour la couvrir de toute ma tendresse.
Il faut que parade cesse, et comme toutes les bonnes choses ont une faim : un bon petit déjeuner sur une table garnie. Promesse d’un brunch qui n’en est pas un, mais qui finira assurément comme tel.
Quatre à quatre, je m’empresse de délivrer le café de son écrin, il emplit la pièce. En une fragrance, je me retrouve dans une maison coloniale, mon hôte cubain me sert un coradito sur fond de montagne laiteuse.
Les confitures maison ornent la table, les viennoiseries se réconfortent dans le four et brûlent de se mêler au café. Trois petites oranges prennent leurs quartiers dans le pressoir, elle s’en régalera plus tard.
La voici qui descend, sourire aux lèvres. Ses yeux rieurs miroitent le serment d’une bonne journée. De ces moments si simples et rares à la fois, le temps s’arrête et nous jalouse. Elle et moi devant ce petit déjeuner.